Avec le dimanche de la Passion nous entrons dans le dernier temps du carême. Nous souffrons avec le Christ, lorsque les lectures de l’Évangile nous font partager ses difficultés. Nous entrons alors dans ce que l’on appelle : le mystère de la croix.
La période qui s’ouvre et qui va jusqu’à Pâques développe 4 thèmes principaux :
le Christ est rejeté par son peuple
le Christ persécuté prie son père
le Christ fait de sa persécution le moyen du salut des hommes
le peuple prend conscience de son erreur
- Le Christ est rejeté par son peuple
Ce temps n’est pas encore celui de la violence des dernières heures mais nous voyons monter l’opposition des chefs de l’église dans cet Evangile de Jean. Cette opposition est de plus en plus forte et marquée. Le Christ n’arrive plus à se faire entendre et comprendre. Jean nous fait vivre ce blocage de plus en plus irréductible. Pour les juifs la parole du Christ est un blasphème. Le refus est net : les hommes ne veulent pas de Celui qui se présente comme le Fils de Dieu.
- La prière du Christ
C’est la plainte du Christ qui monte vers Dieu à travers les mots des psaumes (antienne, graduel, trait). Comme les prophètes qui sont venus avant lui, le Christ est incompris et persécuté. Ces prières traduisent la souffrance liée au décalage entre les aspirations de la nature humaine et les aspirations divines: Le Christ s’est revêtu de notre humanité et il comprend, dans son âme, la difficulté des hommes à suivre la voie que leur offre Dieu.
- La croix, moyen du salut
Le Christ prend pleinement conscience que la mort voulue pour lui par les grands prêtres est inévitable. Caïphe a prophétisé à son sujet : « il est bon qu’un homme seul meurt pour éviter la perte de tout le peuple ». Jésus accepte son sacrifice et cela ajoute encore à sa peine et à sa douleur.
Le Christ perçoit alors encore le sens et le moyen de sa mission. Il comprend que le sacrifice de sa vie devient une réalité. « Quand je serai élevé de la terre, j’attirerai tout à moi. » C’est l’image du grain de blé qui tombe en terre et qui meurt pour porter beaucoup de fruits. Par le sacrifice de la croix, le Christ se place dans la perspective du sacrifice expiatoire du peuple juif : le sacrifice du « pardon » du peuple juif se déroulait avec la présentation de deux agneaux, l’un était relâché (comme Barabbas), le second était sacrifié. Le jour du sacrifice était la veille de la pâque juive, soit le vendredi saint. L’agneau du sacrifice portait une étoffe rouge (comme le manteau dont le Christ sera revêtu par les soldats). Cette étoffe représentait la charge des péchés de toute la communauté (comme le Christ se chargera de tous les péchés du monde). Après le sacrifice, le peuple est aspergé avec le sang des moutons (comme la parole du peuple à Pilate « tue-le, et que son sang retombe sur nous »). Par ce geste le peuple était lavé de ses péchés.
Tous les aspects du sacrifice de la pâque juive sont présents dans le sacrifice de la croix…. mais c’est un homme, le Christ, vrai homme et vrai Dieu qui est sacrifié pour dépasser et accomplir tous les sacrifices et changer la face de l’humanité. Le Christ n’a pas aboli la Loi mais il l’a transcendée, dans l’amour, pour le genre humain tout entier et pour son Père.
- Le « péché » du peuple
A voir souffrir le Christ, nous prenons conscience de nos propres erreurs. En grec, le mot péché se traduit par « faire un pas de côté », « dévier de sa route », « ne pas atteindre son but ». Nous sommes loin des lieux communs habituellement entendus sur la notion de péché. C’est la prise de conscience de notre distance par rapport à ce que doit être le but de notre vie; la conscience de notre écart par rapport à la voie divine. Le péché, s’est d’être séparé de Dieu, parce que l’on prend un chemin qui nous en éloigne. « Et ne permets pas que nous soyons jamais séparés de toi » dit avec insistance la messe de Gazinet.
C’est le sens du voile tendu dans le temple qui empêche le peuple de percevoir le Saint des Saints. C’est le symbole des statues et de la croix voilées au vendredi saint. Nous sommes séparés de Dieu. Après la mort du Christ, le voile du temple qui se déchire symbolise la promesse à venir : oui nous verrons Dieu en face.
Voici ce qui est à vivre en nos coeurs et dans la dimension de l’esprit au cours des deux semaines qui viennent. Que le mystère de la croix et sa méditation nous conduisent nous aussi à déchirer le voile qui obscurcit notre âme, pour aller jusqu’au matin de Pâques, avec le Christ, dans sa résurrection et pouvoir dire ensemble: Il est ressuscité, OUI c’est la Vérité.
Père Robert
Epître : Paul aux Hébreux 9, 11-15
11 Mais le Christ est venu comme grand-prêtre des biens déjà présents d . Il a pénétré dans une tente plus importante et plus parfaite, qui n’est pas construite par des hommes, autrement dit qui n’appartient pas à ce monde créé. 12 Quand le Christ est entré une fois pour toutes dans le lieu très saint, il n’a pas offert du sang de boucs et de veaux ; il a offert son propre sang et nous a ainsi délivrés définitivement de nos péchés. 13Le sang des boucs et des taureaux et les cendres de la vache brûlée e , que l’on répand sur les personnes impures par rapport aux rites, les purifient de cette souillure extérieure. 14 S’il en est bien ainsi, combien plus efficace encore doit être le sang du Christ ! Par l’Esprit éternel, il s’est offert lui-même à Dieu comme sacrifice parfait. Son sang purifiera notre conscience des actions néfastes, pour que nous puissions servir le Dieu vivant.
15 Voilà pourquoi le Christ est l’intermédiaire d’une alliance nouvelle, afin que ceux qui ont été appelés par Dieu puissent recevoir les biens éternels qu’il a promis aux siens. Ils le peuvent parce qu’une mort est intervenue, grâce à laquelle les humains sont délivrés des fautes commises sous la première alliance.
Evangile : Jean 8, 46-59
46 Qui d’entre vous peut prouver que j’ai péché ? Et si je dis la vérité, pourquoi ne me croyez-vous pas ? 47 Celui qui est de Dieu écoute les paroles de Dieu. Mais vous n’êtes pas de Dieu et c’est pourquoi vous n’écoutez pas. »
48 Les Juifs répondirent à Jésus : « N’avons-nous pas raison de dire que tu es un Samaritain et que tu es possédé d’un esprit mauvais ? » — 49 « Je ne suis pas possédé, répondit Jésus, mais j’honore mon Père et vous, vous refusez de m’honorer. 50Je ne cherche pas la gloire pour moi-même. Il en est un qui la cherche pour moi et qui juge. 51 Oui, je vous le déclare, c’est la vérité : celui qui obéit à mes paroles ne mourra jamais. »
52 Les Juifs lui dirent : « Maintenant nous sommes sûrs que tu es possédé d’un esprit mauvais ! Abraham est mort, les prophètes sont morts, et toi, tu dis : «Celui qui obéit à mes paroles ne mourra jamais.» 53 Abraham, notre père, est mort : penses-tu être plus grand que lui ? Les prophètes aussi sont morts. Pour qui te prends-tu ? » 54 Jésus répondit : « Si je me glorifiais moi-même, ma gloire ne vaudrait rien. Celui qui me glorifie, c’est mon Père. Vous dites de lui : «Il est notre Dieu»,55 alors que vous ne le connaissez pas. Moi je le connais. Si je disais que je ne le connais pas, je serais un menteur comme vous. Mais je le connais et j’obéis à ses paroles. 56 Abraham, votre père, s’est réjoui à la pensée de voir mon jour ; il l’a vu et en a été heureux. » 57 Les Juifs lui dirent : « Tu n’as pas encore cinquante ans et tu as vu Abraham z ? » 58 Jésus leur répondit : « Oui, je vous le déclare, c’est la vérité : avant qu’Abraham soit né, «je suis a ». » 59 Ils ramassèrent alors des pierres pour les jeter contre lui. Mais Jésus se cacha et sortit du temple.